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24/08/2014

1944-1945 : la légende du "coup de force communiste"...

 le-communisme-stalinien-en-france1.jpg

Un mythe réfuté depuis 1974 par les historiens : 


 

La commémoration de 1944 est l'occasion de faire le point sur la période. Personne ne nie que les FTP aient tué nombre d'innocents dans certaines régions de France (par exemple au centre de détention clandestine de l'Institut dentaire à Paris, du 20 août au 15 septembre*). Mais ce que les historiens ont établi, c'est que Staline avait interdit au PCF de prendre le pouvoir. Estimant que seul de Gaulle était en mesure d'empêcher la France de devenir un satellite de Washington, il allait déclarer au général (le 19 novembre 1944 à Moscou) : « La France a des chefs maintenant, des chefs intraitables, raides, ne cédant pas. C'est bien, c'est bien, c'est ce qu'il faut. J'en suis heureux. C'est ce qu'il faut à la France. » Staline savait comment de Gaulle avait « restauré l'Etat » en août à Paris et signifié aux communistes (notamment lors sa tournée de septembre 1944 dans l'ancienne zone sud) que l'heure des armes était passée. 

Staline allait réexpédier Maurice Thorez à Paris le 27 novembre, avec l'ordre d'accepter la dissolution des « milices patriotiques » et de faire comprendre aux durs du Parti qu'il n'y aurait pas de prise du pouvoir insurectionnelle. Terrifiée (on la comprend) par les violences FTP de l'été 44, la bourgeoisie française croyait à cette prise du pouvoir. Mais Thorez analysait la situation comme impropre à l'instauration d'un régime communiste, et il voyait en de Gaulle « un leader national » à considérer, plutôt qu'un « chef de file de la bourgeoisie » à abattre – comme le démontrera l'historien Maurice Agulhon au grand colloque de 1974.

Cette attitude de Thorez recoupait celle de la plupart des communistes ayant milité dans la Résistance non-communiste, qui ne pouvaient donc « plus voir les choses comme auparavant », selon le témoignage de l'historien Jean-Pierre Vernant – qui fut lui-même dans ce cas en tant que responsable AS puis FFI en Haute-Garonne. (Il resta membre du PCF jusqu'en 1969).

Le Parti avait fait son choix : renoncer à la révolution, « s'ancrer politiquement et socialement » (Laurent Douzou) et se contenter d'être une organisation de masse : une sorte de contre-société qui allait durer quarante ans.

 

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* Institut dentaire : 38 corps jetés à la Seine, dont celui d'un député SFIO. (Cf. Jean-Marc Berlière, 'Ainsi finissent les salauds', séquestrations et exécutions clandestines dans Paris libéré, Robert Laffont 2012). L'enquête exhaustive des historiens de l'IHTP évalue à 10 822 le nombre des exécutions sommaires de l'Épuration. (Cette évaluation annule le chiffre de "cent mille fusillés" invoqué à partir de 1951 par des publications d'ex-collaborationnistes. Le point de départ de l'extrapolation à "cent mille" fut un article du magazine d'ultra-droite American Mercury, en avril 1946, qui n'avançait d'ailleurs que le chiffre de 50 000). Sur les 10 822 victimes réelles, l'enquête lancée en 1952 (publiée au J.O.du 07/01/1954) distingue 8 867 collaborationnistes et 1 955 personnes tuées "sans mobile avéré" (assassinats politiques, réglements de comptes locaux). Selon l'enquête complémentaire de 1967, le total des exécutions sommaires de collaborationnistes comme Philippe Henriot, avant ou après le 6 juin 1944, fut de 8 775. Sans compter les internements abusifs de l'été-automne 1944... On doit aussi se souvenir que les communistes n'étaient pas seuls à vouloir une épuration : maurrassien jusqu'en 1940, Philippe Leclerc de Hautecloque catholique convaincu – était partisan d'une rigueur extrême envers les collaborationnistes.

 

 

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 Le "péril stalinien en France" : prétexte de Vichy, recyclé par la guerre froide.

 

 

12:32 Publié dans Histoire, Idées | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : histoire

Commentaires

> Merci pour cette mise au point très instructive.
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Écrit par : collignon / | 24/08/2014

HISTOIRE

> Notre Histoire est passionnante. Dommage que tous ceux qui ont un pouvoir actuellement ne sachent en tirer les leçons et en faire bon usage...
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Écrit par : Patrick Pique / | 24/08/2014

1947

> De Gaulle parti, il y eut cependant fin 1947 les grèves insurrectionnelles de la CGT soutenues par le PC, appliquant les décisions du Kominform.
Fin novembre, le nouveau président du conseil Robert Schuman mobilise 80 000 réservistes, les sabotages se multiplient (rails déboulonnés : 20 morts, 60 blessés sur le Paris-Lille, le 4 décembre…) mais voici que Notre-Dame apparaît à quatre fillettes à l’église Saint-Gilles de L’Ile-Bouchard (Indre-et-Loire) :
« Dites aux petits enfants de prier pour la France, car elle en a grand besoin » (8 décembre 1947) ; « Priez pour la France qui est, ces jours-ci, en grand danger » (9 décembre 1947) ; « Je ne suis pas venue ici pour faire des miracles, mais pour vous dire de prier pour la France » (10 et 12 décembre 1947) ; « Il faut prier et faire des sacrifices » (14 décembre 1947)…
Merci à tous les parents et grands-parents qui entendent encore aujourd’hui cet appel à prier, avec leurs enfants, pour la France !
Contre tous les coups de force, privilégions le coup des faibles, la prière.

Denis


[ PP à D. - Les phrases que vous citez montrent que le message de l'Ile-Bouchard a été surinterprété à droite. La France vivait des heures difficiles, oui, mais elle ne vivait pas une révolution... dont Staline ne voulait pas. Il avait l'Europe de l'Est à digérer, c'était en soi un problème suffisant ; et l'Europe de l'Ouest était occupée par l'armée américaine ! Les grèves de 1947 étaient ultra-dures pour faire pression ; elles n'étaient pas "insurrectionnelles", parce qu'aucune insurrection n'était au programme - malgré ce que racontait Jules Moch. ]

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Écrit par : Denis / | 24/08/2014

URSS ET RUSSIE

> Si la remarquable ténacité gaullienne à l'encontre des Alliés occidentaux (pour ne pas écrire "des Anglo-Étatsuniens") fut (un temps) bénéfique à l'autonomie de la France, elle faisait aussi grandement l'affaire de Staline : intérêts partagés et collusion objective.
Dans la mesure où le "bloc de l'Est" devait s'écrouler 45 ans plus tard, c'était un bon calcul (cette échéance était-elle si claire dans la pensée du chef de la France Libre ?) sans graves conséquences à terme, même si cette période n'a pas été rose pour les peuples sous le joug. L'Histoire est plus facile à maîtriser quand on en connaît la fin.

F.


[ PP à F. - Il semblerait que de Gaulle ait pressenti que l'URSS était trop artificielle pour durer. Rappelez-vous qu'il l'appelait : "la Russie"... ]

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Écrit par : Fondudaviation / | 24/08/2014

47-48

> Et la situation de 47-48, avec les apparitions de l'Île Bouchard ?

Ludovic


[ PP à L. - L'Eglise ne saurait être en contradiction avec les réalités. ]

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Écrit par : Ludovic / | 24/08/2014

LA BOMBE

> J'ai lu une explication plus "globale", chez l'historien Antony Beevor qui se fondait sur des archives russes nouvellement sorties : Staline aurait reculé à cause de la bombe atomique déjà en possession des Américains, et des menaces voilées sous d'amicaux conseils de ces derniers au tyran communiste. A vérifier.
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Écrit par : jem / | 24/08/2014

LA LIGNE DU P.C.F.

> Ce refus de profiter de la situation pour déclencher un processus révolutionnaire, c'est justement ce que de 1945 jusqu'aux années 70 toutes les "gauches de la gauche" (trotskistes, anarchistes etc...) ont violemment reproché au PCF.
Mais c'est sûrement ce qui lui a permis de rester un parti populaire, au double sens d'une structure recrutant dans les milieux les plus défavorisés et y jouissant, malgré les révélations sur le stalinisme, de leur confiance et d'une aura certaine, jusqu'à la première élection de Mitterrand au moins, quand les gauchistes de tout poil ne pouvait compter que sur quelques intellectuels et une partie de la jeunesse scolaire et universitaire d'extraction petite-bourgeoise, ancêtres des bobos actuels moitié EELV, moitié Parti de Gauche.
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Écrit par : grzyb / | 24/08/2014

LE MESSAGE DES APPARITIONS DE L'ILE-BOUCHARD EN 1947

> D’une part "la France est en grand danger" peut viser bien des dangers.
Du haut du Ciel, on voit plus loin que l'actualité immédiate.
Le communisme a été l'un des nombreux pantins dont le Mal s'est servi pour couper l'Homme de Dieu, après/avec l'individualisme, le matérialisme, le nazisme, etc.
Le danger pouvait en effet venir directement du communisme comme de la réaction de peur face au danger communiste (démission ou au contraire crispation désordonnée), de l'effondrement de l'Etat, de l'anarchie, voire pourquoi pas, de la prise en main américaine avec vassalisation de la France.
Que pouvait-il ressortir de ces grèves de 47 ? pas du bien.
D'ailleurs aujourd'hui il n'y a pas de risque de prise du pouvoir communiste et l'on prie toujours pour la France à L’Île Bouchard aujourd'hui.

D’autre part, si "la France est en grand danger" visait effectivement uniquement le danger communiste (en effet la sainte Vierge n’est pas encartée au PCF), le mode opérationnel de celui-ci n’est pas forcément le coup d’Etat.
Le "danger", c'était peut-être non pas le mode d’action pour une prise de pouvoir par les Communistes en 47 (comme ils l'ont fait l'année suivante à Prague où n'était pas l'armée américaine) mais que le gouvernement se laisse impressionner par les manifestations de masse, ne vote pas une loi" de défense de la république " comme il l’a fait en décembre 47 mais cède, laisse faire, collabore : pas de coup d'Etat donc mais une renonciation, l’instauration légale du communisme. En 47/48, les Etats-Unis étaient encore d’une naïveté stupéfiante quant au communisme.
Car personne ne nie qu'il y ait eu un danger :
"ma chère Marthe la France est foutue dit d'ailleurs le Père Finet
-non car la Sainte Vierge la sauvera par la prière des enfants."
Mais M Robin, L'Ile Bouchard, tout cela est en cours de reconnaissance (ou non) par l'Eglise et celle-ci ne tranchera pas sur un point d’histoire.
Aucune importance puisque de toute façon c'est un devoir du chrétien de prier pour la vraie paix fondée sur la Vérité, dans son esprit, dans sa famille, dans son pays, dans le monde.
Le vrai désir du bien n'est pas compartimenté, il est croissant.
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"L'Eglise ne saurait être en contradiction avec les réalités. "
Evidemment non puisque l'Eglise enseigne le chemin de la Vérité que reflètent les réalités (souvent par l'absurde).
Mais autant préciser que cela ne signifie pas que les historiens connaissent et écrivent toutes les réalités dans leurs ouvrages.
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Sans remettre en cause ce que vous citez, 1974, ça fait 40 ans ; si possible, il vaut mieux citer des sources plus récentes, bénéficiant des ouvertures d'archives qui ont eu lieu depuis. (je le dis parce que c'est ce qu'on va vous opposer sans même regarder le fond)

Quel est le malheur de l’Homme ? ce n’est pas qu’il soit communiste, libéral, nazi, socialiste, individualiste, consumériste mais qu’il ait en lui ce que d’ailleurs ont en commun toutes ces idéologies, un désir de prendre la place de Dieu.
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Écrit par : E Levavasseur / | 25/08/2014

L'ILE-BOUCHARD

> Mais les apparitions de Marie à l'Ile-Bouchard ne parlaient-elles pas du danger de putsch communiste en France ?

Emmeline


[ PP à Emmeline - Mais non, elles n'en parlaient pas. Je vous propose de consulter l'échange de commentaires à ce propos, ci-dessus. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Emmeline / | 25/08/2014

@ Emmeline

> Elles parlent de "grand danger".
Que ce grand danger ait été lié aux grèves, ça paraît évident, mais quelle était la nature de ce danger (coup d'Etat ou sournoise infiltration rendue possible par la démission d’un gouvernement apeuré, communisme lui-même ou réaction désordonnée face au communisme) ce n'est pas dit. On ne peut pas inventer.
Cela ne signifie pas pour autant que les communistes ne voulaient pas orienter la société française dans leur sens mortifère ni qu’ils désiraient l’indépendance pleine et entière de la France vis-à-vis de l’URSS !

Il n'y a pas eu d'apparition dans les années 30 : inutile puisque tout avait été dit par le pape dans plusieurs textes officiels : « non abbiamo bisogno » contre le fascisme, « mitt brennender Sorge » contre le nazisme, « divini redemptoris » contre le marxisme.
Ce qui provoque les déplacements des citoyens du Ciel sur la terre ce sont plus les dangers d’empoisonnement de la Vérité, de péché contre l’esprit quand ils ne sont pas déjà dénoncés par le vicaire du Christ que les dangers bien visibles, matériels reposant sur la force.
Un panzer ou un T-34, c’est moins dangereux pour l’âme qu’un poison mielleux, qu'un serpent séduisant que le pape n’a pas encore repéré.
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Écrit par : E Levavasseur / | 25/08/2014

à tous,

> Quoi qu'il en soit : aujourd'hui c'est le 25 août , prions saint Louis !
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Écrit par : E Levavasseur / | 25/08/2014

L'ANNÉE 1947

> Votre article parle de 44-45. Et on peut comprendre l'approche de Staline.
L'Ile Bouchard, c'est fin 47. et sans sur-interpréter, on peut lire " Priez pour la France qui est, ces jours-ci, en grand danger "
Est-ce que la position de Staline n'aurait pas varier en 2 ans, d'autant que de Gaulle n'est plus là ?

Ludovic


[ PP à L. :

- L'étude des archives du Kremlin par les historiens depuis 1991 montre que non.

- Et c'est compréhensible, puisque 1947 est l'année
où Staline est accaparé par la prise en main politique, économique et militaire des pays conquis à l'Est : Tchécoslovaquie, Hongrie, Pologne ;
où il sent venir la "trahison" de Tito en Yougoslavie ;
où il démultiplie les goulags ;
où il doit remettre au pas les intellectuels soviétiques ;
et surtout, 1947 est l'entrée dans la Guerre froide. Face à Washington doté de l'arme nucléaire, Moscou n'a en tête que la sécurité de son espace géopolitique.
Comment Staline aurait-il eu l'idée d'ouvrir en France un front de guerre civile perdue d'avance (l'Europe occidentale étant tenue par l'armée américaine), et de risquer ainsi une défaite qui aurait fissuré son emprise sur les nouvelles "démocraties populaires" ?

- Non, il faut renoncer à ce mythe de droite qu'est la "menace de putsch communiste en France en 1947"... Et il faut renoncer à y mêler la religion ! Ce genre de confusions, dévaluées ensuite par les travaux des historiens, n'a jamais été salubre pour la foi. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Ludovic / | 25/08/2014

DÉCOUVERTES

> Hé ben…Moi aussi, j'étais persuadé qu'en 1947, nous étions à la veille d'un coup d'Etat communiste. Ces derniers temps, beaucoup de découvertes (et surtout de désillusions…) sur l'histoire récente de mon pays et du monde. L'UE, une création américaine... La FED, une quasi association de malfaiteurs (pardon, d'investisseurs éclairés et entreprenants)…

Comme beaucoup de p'tits gars nés pendant les Trente glorieuses, j'étais persuadé d'être globalement du bon côté de la barrière. Le Monde Libre Béni de Dieu. Pas chez les rouges et pas chez les crève-la-faim du Tiers monde… Le pied, quoi.

Il y a quelques semaines, j'ai regardé ma carte d'identité. En lieu et place de ce que je pensais être ma véritable identité, j'ai lu : Nom - Burbank ; Prénom - Truman. Les b…les.
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Écrit par : Feld / | 26/08/2014

STALINE

> "La France a des chefs maintenant, des chefs intraitables, raides, ne cédant pas. C'est bien, c'est bien, c'est ce qu'il faut. J'en suis heureux. C'est ce qu'il faut à la France. »

Tout était dit. En dépit d'une pointe de brutalité dans la conduite des affaires, Staline était, quelque part, un vieux sage...
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Écrit par : Feld / | 26/08/2014

> Merci, c'est plus clair ainsi !
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Écrit par : Ludovic / | 27/08/2014

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